Un immeuble flouté et un tampon "trêve hivernale"

La trêve hivernale est cette période de l’année durant laquelle le locataire ne peut être expulsé de son logement. Cette trêve, votée deux ans après l’émoi suscité par l’appel de l’Abbé Pierre en 1954, perdure aujourd’hui. Elle a même été renforcée.

Si cette trêve hivernale est un répit pour les locataires lors des mois les plus froids, elle est parfois vécue comme une période d’inaction pour les bailleurs. Alors qu’au contraire, ce délai est propice à agir lorsqu’on est aux prises avec un locataire cumulant les impayés de loyer.

Trêve hivernale : ses délais

D’ordinaire, la trêve hivernale s’étend chaque année du 1er novembre à la fin mars. Initialement, la trêve s’étendait jusqu’au 15 mars, mais la loi Alur l’a prolongée jusqu’au 31 mars.

J’en profite d’ailleurs pour évoquer une idée répandue selon laquelle la trêve hivernale ne serait pas la même selon que le bailleur loue son bien « vide » ou meublé. C’est une idée fausse : les règles sont parfaitement identiques dans les deux cas.

Durant la récente pandémie de Covid – des circonstances exceptionnelles – la trêve hivernale a été prolongée de deux mois en 2020 et 2021. Sur ces deux années, elle a donc pris fin au 31 mai.

Les différentes étapes qui précèdent une expulsion

Avant de plus expliciter l’intérêt pour les bailleurs de cette trêve hivernale, il me faut rappeler les principales étapes susceptibles de mener à l’expulsion d’un locataire ne payant plus son loyer.

A. La relance du locataire

Dès que le locataire ne règle pas son loyer à la date convenue, vous devez le relancer immédiatement à ce sujet. Il s’agit en effet d’une rupture sur l’une des principales obligations du locataire.

N’attendez surtout pas que les impayés s’accumulent.

La relance peut se faire d’abord par téléphone, mais pensez à doubler votre requête par mail, cela vous fera une trace écrite.

Trève hivernale : cas d’expulsions possibles

Quatre exceptions existent et rendent possible une expulsion forcée même durant la trêve hivernale.

  1. Lorsque le logement est frappé d’un arrêté de péril ou situé dans un immeuble frappé de péril
  2. Si l’expulsion est assortie d’un relogement du locataire. Le relogement doit être adapté aux besoins familiaux du locataire. En l’occurrence, il faut que le logement de remplacement soit pourvu d’autant de pièce qu’il y a d’occupants.
  3. Si le logement est squatté. Les bailleurs doivent à ce sujet savoir qu’un ex-locataire resté après la fin du bail sans accord du propriétaire n’est pas considéré comme un squatteur par la justice.
  4. Lorsqu’un juge aux affaires familiales a ordonné l’expulsion d’un conjoint violent.

B. La mise en demeure du locataire

Si, au bout de 15 jours, le locataire n’a toujours pas réglé ce qu’il doit, le bailleur peut lui envoyer une mise en demeure de payer en recommandé avec accusé de réception.

Il vous est aussi possible de mettre en place  avec le locataire un échéancier de la dette locative .

Il est aussi possible pour le bailleur de contacter l’Agence Nationale pour l’Information sur le Logement (ANIL). Celle-ci propose notamment « SOS impayés de loyer », une ligne gratuite (0805 160 075).

C. L’intervention de l’huissier

Passé le deuxième mois d’impayé, le bailleur va devoir passer par l’huissier pour qu’il envoie un commandement à payer au locataire.

Ce commandement laisse un délai de deux mois au locataire pour régler ce qu’il doit au bailleur.

D. Saisine du juge du contentieux

Si le locataire ne s’est pas conformé au commandement à payer délivré par l’huissier, le bailleur doit désormais en passer par la justice.

En l’occurrence, il doit contacter le tribunal judiciaire et saisir le juge du contentieux et de la protection.

Le magistrat rendra un jugement. Il peut non seulement condamner le locataire à régler ses impayés. Mais aussi mettre un terme au contrat de location et ainsi prononcer l’expulsion.

Attention : le juge procède au cas par cas. Il n’a donc pas vocation à prononcer l’expulsion systématiquement. Le magistrat entendra le locataire – qui pourra exposer la précarité de sa situation – ainsi que le propriétaire.

Et le magistrat sera épaulé par différents intervenants (assistante sociale, CAF etc…). Lesquels se mobiliseront pour tenter de trouver au locataire une solution de relogement et/ou des aides financières.

Si, malgré tout, le juge met fin au contrat de bail et ordonne l’expulsion, le locataire a un nouveau délai d’un mois pour envisager de faire appel.

E. Dernier délai avant expulsion

Lorsque le juge du contentieux a prononcé la rupture du bail ainsi que l’expulsion, un nouveau délai commence.

Car une fois reçue l’injonction de quitter les lieux, le locataire bénéficie d’un ultime délai de deux mois pour se retourner et obtempérer.

Passé ce délai, c’est uniquement lorsque le locataire ne s’est pas conformé à la décision de justice que l’expulsion judiciaire « forcée » peut être envisagée.

Ce ne sont ni le bailleur ni un huissier qui devront procéder à cette expulsion contrainte. Ne tentez jamais de jouer au bailleur « gros bras » face à un locataire. Il s’agit en effet d’un délit punissable de trois ans de prison et d’une très lourde amende (30 000 €).

En passant par l’huissier, il faudra donc demander l’assistance de la préfecture qui pourra dépêcher des membres des forces de l’ordre (gendarmerie ou police). Eux seuls on le droit de procéder à l’expulsion forcée.

Le locataire peut, par ailleurs, demander un délai supplémentaire au juge de l’exécution.

Si ce magistrat tranche en sa faveur, le locataire bénéficiera d’un délai supplémentaire qui ne peut être inférieur à trois mois.

Trêve hivernale : l’occasion d’agir pour le bailleur

Vous l’aurez compris à l’exposé des différentes étapes susceptibles de mener à l’expulsion d’un locataire ne payant pas son loyer. Il s’agit d’un processus longue durée qui va nécessiter au bas mot six mois à un an. Dans les faits, cela se prolonge souvent sur deux ans.

Le processus s’avérera aussi coûteux puisque le bailleur devra régler plusieurs interventions d’huissier ainsi que d’éventuels honoraires d’avocat.

Du fait de cette longue durée, plus tôt le bailleur aura démarré son action, moins de temps sera perdu à la fin de la trêve hivernale.

Conclusion : trêve hivernale, agir pour gagner du temps

Cette période de protection offerte aux locataires par la trêve hivernale n’est donc pas un moment d’inaction imposée au bailleur.

Si votre locataire ne paie pas ou plus son loyer, cette trêve est au contraire un temps propice à démarrer le processus sans perdre de temps.

En espérant, bien sûr, qu’en cours de route, une solution amiable et convenant à tous – bailleur et locataire – pourra être trouvée…

Portrait Jérôme Simon

Jérôme Simon

Agent immobilier

Je dirige l’agence Guy Hoquet de Versailles et vous épaule à chaque étape de votre projet immobilier à Versailles. Avec un seul et unique objectif : votre réussite.

Share This